René GASTON-LAGORRE, une vie de peintre

René GASTON-LAGORRE, une vie de peintre
1913 (New-York) – 2004 (Paris)

René Gaston-Lagorre

René Gaston-Lagorre

« Mes peintures sont des vanités tout simplement
 mais peintes avec des couleurs gaies », René Lagorre

« La peinture abstraite est toute ma vie, je me repose dans le figuratif »
René Lagorre, 1987

Enfance et adolescence

Né à New York en 1913 de parents ariégeois émigrés,- comme beaucoup de français originaires des vallées de Seix, d’Oust et d’Ercé-, issu d’une très modeste famille et très vite pupille de la nation, le jeune René revient en France dans les années 20.
Ne parlant qu’américain, et étant encore très jeune, il éprouve quelques difficultés à l’école mais, encouragé par un enseignant d’exception,  Monsieur Jules Palmade qui a très vite détecté les aptitudes de son jeune écolier, il se met au travail. Très jeune, René Gaston-Lagorre manifeste en effet du goût pour le dessin : en gardant les moutons dans les paysages grandioses qu’il peindra des années plus tard, il avoue déjà dessiner sur des morceaux d’ardoise arrachés aux toits des granges.
A tout juste 17 ans, il va obtenir une bourse de la ville de Toulouse et peut ainsi entrer aux Beaux arts.
A 20 ans, il décroche le premier prix municipal de la ville de Toulouse. La toile primée, La Baignade, sera acquise aux Beaux arts. Nous sommes alors en 1935.

Scène de fenaison

Scène de fenaison

Une vie d’artiste  peintre , des œuvres majeures

Reçu élève à l’école nationale supérieure des Beaux arts de Paris, il appartient à l’école de Lucien Simon puis à celle, toute aussi prestigieuse à l’époque, de Fernand Sabatté.
Il obtient le prix Lefranc et réalise, dans la foulée, sa première exposition en 1938 à la galerie Montaigne.
Recommandé à l’abbé Carrère par Mme Benqué, rencontrée quelques temps auparavant à Seix, le peintre va exécuter dans l’église gothique du XIVe siècle de St Laurent de Save, en Haute Garonne, une peinture aux dimensions impressionnantes, la plus grande toile qui ait jamais existé sur le Martyre de Saint Laurent  (1938). Il faudra attendre le 30 avril 2001, pour que cette œuvre soit définitivement inscrite au patrimoine régional des monuments historiques,  au grand plaisir du peintre. Les experts en la matière reconnaissent par cet acte le talent du peintre et l’officialisent par cette inscription au patrimoine artistique, ce qui, en général, ne se fait que rarement du vivant de l’artiste.
La hauteur de la toile est de 11 mètres, sa largeur de 7 mètres 20.
«  J’ai voulu et conçu cette peinture hors de toute influence picturale, avec les seules données de l’hagiographie. J’ai ressenti à la réaliser une exaltation merveilleuse qui m’égalait aux grands maîtres de la chapelle sixtine » a-t-il pu dire, souriant malicieusement de sa boutade !

Le Martyre de St Laurent  (IIIe s.) est raconté à la manière du Moyen-âge, par la seule expression plastique.

Le martyre de St Laurent

Le martyre de St Laurent, église de St Laurent sur Save

«  J’ai voulu réchauffer ce mur comme une grande tapisserie gothique. Face aux vitraux du sanctuaire, mes couleurs cherchent à être aussi chaudes et flamboyantes que possible. »

Dès 1943, René Gaston-Lagorre expose à la rotonde du Capoul à Toulouse.
En 1945, il expose à Alger à la galerie Farnèse.
Dans les années 50, il peint des toiles nommées Printemps en Ariège, la Source et le berger
Encouragé par ses maîtres (il croisera Matisse à Saint Paul de Vence qui l’invitera à passer un moment dans sa villa appelée « le Rêve » et qui lui déclarera au vu de ses œuvres « Mon petit, tu es un peintre ! », il va par la suite exposer à Paris, Toulouse, Rabat, Casablanca, Meknès, ou encore à Bastia…

Le musée des Augustins de Toulouse lui achète l’une de ses toiles,  Le Cap Falcon , paysage oranais ; Il lui achètera plus tard une seconde toile nommée Femmes au balcon puis une troisième, Estuaire de la Seine : René Gaston-Lagorre faisait en effet souvent de courts séjours en Normandie où il peindra d’ailleurs le portrait de sa filleule, Joëlle Gaston-Lagorre . La Normandie est une région qu’il appréciait pour la douceur de ses paysages et pour cette lumière si particulière qui avait séduit, avant lui, les impressionnistes, et notamment le peintre Claude Monet.
René Gaston Lagorre, à cette époque, séjournera à Rouen, aux Andelys, à Honfleur.
De retour dans la ville rose, il exposera ensuite à la galerie de l’Entr’aide des compositions aussi variées qu’inspirées : Pastorale, Retour de pêche, La menace d’orage, L’enfance de Bacchus ou encore Bacchus ivre, les bourreliers à Sfax
En 1951, il est invité à la première Biennale de France à Menton qui groupait quelques 200 exposants et y connaît un réel succès. De nombreux articles de journaux en attestent à l’époque.
Nouvelles expositions à la galerie La Boétie (l’une des plus importantes galerie parisienne de l’époque), puis à Cannes, à Alger… René n’hésite pas à voyager, surtout en Espagne et en Afrique du Nord, guidé et tenté qu’il est par les chaudes couleurs d’un orientalisme qu’il apprécie.

Dans l’église de Seix, église fortifiée du plus pur style baroque,  on lui doit bientôt (1952-1953), la décoration des fonts baptismaux : quatre peintures murales représentant Le baptême du Christ , la Vierge Marie, le Christ du Bon Pasteur et une représentation de Saint Etienne, patron de l’église éponyme.

En 1957, René Gaston-Lagorre présente un remarquable ensemble d’œuvres à la mairie de Seix en présence du maire Paul Ané et en présence de celui qui l’a encouragé depuis toujours, Jules Palmade  : ce sont des toiles peintes depuis une dizaine d’années, rapportées d’Espagne comme Avant la corrida ou des Gitans mais aussi des pêcheurs et des paysages corses. Son ami Ryton Cazenave expose à ses côtés ses superbes tilleuls.
Plusieurs œuvres « de commande » ont été passées à René Gaston-Lagorre. Ainsi peindra-t-il, à la mairie de l’Isle en Dodon, les Quatre saisons ; puis, juste après la Libération, à Meilhan, dans le Gers cette fois, il rendra  hommage aux résistants du maquis par le biais d’une toile intitulée Hommage aux héros de ce maquis : est-il besoin de rappeler que le 7 juillet 1944, soixante seize maquisards sont massacrés par les nazis, parmi lesquels vingt quatre jeunes dont les portraits encadrent, chacun dans un médaillon, l’ensemble de la toile ?  ; à la mairie de Boussens, sept panneaux rendent à leur tour   un hommage appuyé de l’art à l’agriculture et à l’industrie ; à la mairie de Colommiers  existe toujours  un Hommage aux créateurs de caravelle, à Sud aviation une Histoire peinte de l’aéropostale qui célèbre les pionniers de la ligne, à Foix, d’autres œuvres encore…

Seix. Le marché

Seix. Le marché

L’état a fait l’acquisition de son tableau Le Jardin du peintre Bonnard.

On le voit, dès son plus jeune âge, inlassablement, tout au long de sa vie, René Gaston-Lagorre va vivre uniquement par et pour la peinture,- même s’il ne cessera de déconseiller ce style de vie et  ce type de pratique à de jeunes artistes venus le presser pour lui demander conseil en matière d’avenir -…
Parmi ses œuvres remarquables existent également un portrait de sa mère (collection privée) mais aussi un portrait du cardinal Saliège, un portrait du cardinal Richaud et celui, plus célèbre encore, de Serge Lifar.

Dans les années 1960, sa peinture évolue du figuratif vers l’abstrait.
Avec la série des «Z», René Gaston-Lagorre traduit sur la toile sa réflexion sur l’éphémère.
Ainsi affirme-t-il que le « Z » en matérialisant l’éclair, symbolise notre  «passage éphémère sur terre», que ce « Z » donne à voir mais surtout à penser, qu’il est un signe bref, reflet dans un miroir, une image de la vie dans sa beauté et sa brièveté même : c’est que, selon lui,  l’art abstrait n’est pas seulement un problème d’espace pictural, il doit aussi véhiculer un contenu…

Célibataire endurci, il affirmait que ses œuvres étaient ses enfants et les acheteurs, ses héritiers.
«Avec vous, avait-il coutume de dire aux acheteurs,  je sais que mes enfants seront entre de bonnes mains.»
Outre ses nombreux voyages dans le monde où il puise de nouvelles sources d’inspirations, ce peintre des couleurs partage sa vie entre Paris et Seix, où il passe ses étés dans la maison familiale, située dans une rue qui aujourd’hui porte le nom du peintre.

C’est alors qu’il impulse et organise des manifestations culturelles autour de son œuvre mais aussi autour de celles de jeunes artistes.
Le 5 octobre 1980 a lieu l’inauguration du chemin de croix offert à l’église de Couflens par René Gaston-Lagorre, en présence de Mgr Soulié, évêque de Pamiers de Mr Roger Barreau, maire de Seix et conseiller général et de Mr P. Daidié, maire de Couflens.

Le peintre s’éteint le 21 février 2004, à l’âge de 91 ans ; incinéré au funérarium de Tarbes, il repose désormais au cimetière de Seix.

En  décembre 2005, le peintre ayant prévu une vente pour la lutte contre le cancer, la vente du fonds d’atelier s’est déroulée à Seix et a connu un vrai succès. René Gaston-Lagorre a d’ailleurs fait de  l’assosiation ARC son seul et unique héritier, ce qui montre assez sa générosité.

Dans un tout autre registre, c’est également à René Gaston-Lagorre que l’on doit, dans les années 50, la publicité pour les eaux d’Aunac ( Audinac), représentant une femme nue sur fond de verdure et de cascade.
C’est encore  René Gaston-Lagorre qui est l’auteur de l’illustration postale  apposée sur les enveloppes seixoises pour signifier l’appartenance de Seix au Couserans-Ariège-Pyrénées.
C’est enfin lui qui réalisa le logo des Chemins de la Liberté, reproduit notamment sur la stèle installée au Camp de Peyret, à Aunac (à rendre interactif), stèle inaugurée de son vivant, le 12 juin 1994.
Ces stèles commémoratives, rappelons-le, rendent un hommage appuyé aux passeurs de la Seconde guerre mondiale, en jalonnant leur ancien parcours.

Ses expositions…, des thématiques toujours renouvelées et parfois inspirées par le patrimoine architectural ou naturel de son village d’adoption.

•    Exposition, Galerie Montaigne, Paris, 1938
•    Exposition à l’hôtel Capoul, Toulouse, 1943
•    Exposition, Galerie Farnèse, Alger, 1945
•    Exposition, Galerie Casser, Cannes, 1947
•    Exposition à Paris, Galerie La Boétie, 1948
•    Exposition, Meknès (Maroc), 1950
•    Exposition, Galerie Chappe, Toulouse, 1950
•    Exposition, Galerie Chappe, Toulouse, 1952
•    Exposition, Meknès (Maroc) janvier 1953
•    Exposition, Galerie du Livre, Casablanca (Maroc), 1953
•    Salon d’automne, Paris, 1954
•    Salon d’automne, Paris, 1955
•    Exposition, Galerie Chappe, Toulouse, novembre 1956
•    Paysages d’Andorre, Galerie Chappe, Toulouse, novembre-décembre1957
•    Exposition organisée avec Monsieur Palmade sur les artistes et les écrivains ariégeois, 1957
•    Exposition, Carcassonne, 1958
•    Paysages, Galerie Rivère, Paris, novembre 1959
•    Les Gitans, Galerie Chappe, Toulouse, 1960
•    Exposition, Lérida (Espagne), 1963
•    Gouaches et peintures, Galerie Chappe, Toulouse, 1963
•    Peintures et gouaches, impressions de voyage, Biennale de Juan les Pins, décembre 1964
•    Peintures et gouaches d’Espagne, Grand hôtel Palace de Juan les Pins, janvier 1965
•    Montségur, Lavelanet, Montségur et  Seix, juin – août 1967
•    Exposition, Salon de Montrouge, 1968
•    Seix, Seix, 1968-1969
•    Terres latines, Grand Palais, Paris, 1969
•    Les bergers, Mairie de Seix, 1969-1970
•    L’Espagne, paysages, Seix, juillet-août 1970
•    La corrida, Seix, 1971
•    Exposition, Salon des réalités nouvelles, Paris, 1972
•    Lagorre et ses paysages, Mairie de juillet-août 1972
•    Du figuratif à l’abstrait, Galerie Inart, Toulouse, 1973
•    Exposition, Salon des réalités nouvelles, Paris, 1973
•    Les isards, Mairie de Seix, août 1974
•    Les fleurs, Mairie de Seix,  août 1975
•    Don Quichotte, croquis et gouaches, Galerie du Taur, Toulouse, 1976
•    Don Quichotte, Mairie de Seix,  juillet-aôut 1976
•    Les gitans, Mairie de Seix, juillet-août 1977
•    Le cirque, Mairie de Seix, 1978-1979
•    Granges,  foires et marchés d’autrefois, Mairie de Seix, juillet-août 1981
•    Paris, Mairie de Seix, juillet-août 1982
•    Tolède, Marrakech, deux modèles, deux exemples,Seix, juillet-août 1983
•    Les montreurs d’ours, Mairie de Seix, juillet-août 1984
•    Peintures, les bergers, Mairie de Seix,1985
•    Le carnaval de Venise, Mairie de Seix, 1986
•    Les Z, Paris, Galerie Weiller, Paris, juin 1987
•    Noir  et blanc, Mairie de Seix, 1987
•    Gitans et bergers, rétrospective, Mairie de Seix, août 1988
•    Exposition, Foire internationale de Bologne(Italie), 1989
•    Exposition, Art Junction International, Nice, 1989
•    Exposition, Tokyo Art, Tokyo, 1990
•    Exposition des Z , Galerie K., Washington (USA), 1990
•    Exposition Présent de Robert Marteau,  Grand Palais, Saga, Paris, 1991
•    Exposition, Galerie K., Washington (USA), 1992
•    Les Ateliers, Galerie Weiller, Paris, 1992
•    Figures dans le Z, Galerie Weiller, Paris, 1994-1995
•    Les Z, peintures, Mairie de Seix, 1995
•    Parcours…, Galerie Joseph Bergès,Château du vicomte, Saint-Girons, août 1996
•    Bouquets dans le Z, Paris, février 1997
•    Danse dans le Z, Paris, 1999
•    Peintures Z 2003, Galerie Weiller, Paris, 2003

Bibliographie succincte

Cartes postales en vente au château

Cartes postales en vente au château

•    René Lagorre, pochette de cartes de reproductions de peintures réalisée par les cartophiles ariégeois, A. Bourneton photographe, 1987. Mairie de Seix.

•    Bulletin des amis d’Aulus et du Garbet, n° 28, article de R. Gabarre sur René Gaston-Lagorre.

•    Interview de René Gaston-Lagorre par Gérard Tamagnan, L’Ariégeois, 1987, pp.39-43.

•    Sur le Martyre de Saint Laurent dans l’église de St Laurent de Save, un article, tiré-à-part signé de Louis Carsalade avec explication détaillée du tableau (à retrouver dans Lagorre en Haute-Save).

•    René Lagorre, Les Ateliers, Catalogue d’exposition, Préface de Robert Marteau, photos de Jacques Faujour, Galerie Weiller, Paris, 1992

•    Figures dans le Z, Paris, Catalogue d’exposition, Préface de Robert Marteau, Photos de Jacques Faujour, Galerie Weiller, Paris, 1994-1995

•    Bouquets dans le Z, Catalogue d’exposition, Préface de Robert Marteau, photos de Jacques Faujour, Galerie Weiller, Paris, février-mars 1997

•    Article consacré à René Gaston-Lagorre, in Dictionnaire biographique et généalogique des ariégeois, Moulis Adelin, 2001

•    Lagorre en Haute Save, Louis Carsalade , Association Savés Patrimoine, 2001

•    René Gaston-Lagorre, une vie dédiée à la peinture, dossier 4 p. réalisé par Carine de la Chouë de la Mettrie, Le Couserans, n°6, été 2004.

•    » Lagorre, peintre du mouvement », L’Ariégeois magazine, n°177, Jean-Louis Causse,  juillet-août 2009.

Durant l’été 2013 le château de Seix a accueilli une exposition exceptionnelle des oeuvres du peintre pour fêter son centenaire.

Un livre richement illustré publié aux éditions du Pas d’Oiseau témoignant de l’oeuvre du peintre est en vente au château ainsi qu’ au siège de l’association Patrimoine seixois.

 

Couverture livre. Le hameau de Capvert